L’année dernière j’avais lu avec envie les comptes rendus de Foutrak et Lily.running.
Ça avait l’air d’être une expérience géniale mais je savais aussi que faire un trail tel que celui-ci demande un minimum d’entraînement. Surtout pour moi, miss bitume par excellence.
J’avoue que c’est un peu sur un coup de tête que je m’y suis inscrite. J’en parle alors à mon amie Tekla qui semble aussi intéressée pour faire la course. Qui dit Tekla, dit son mari André puis leurs amis Didier, Véronique et Guillaume se sont incrustés dans l’aventure. Plus on est de fou, plus on rit 😉
Je ne mesurais pas trop la distance ni le dénivelé que j’allais me manger. À l’époque, mon seul objectif était de préparer correctement Madrid, le reste on verra ensuite.
Madrid est alors passé et vu comment j’avais galéré à finir mon marathon et ses presque 400m de D+, je me suis remis vachement en question pour La Plagne. Même si, on est d’accord, un trail et un marathon n’ont rien à voir.
Pour être honnête avec vous, je suis un peu allée en touriste sur cette course. Petite blessure au pied en début de prépa, manque de temps et parfois d’envie. J’ai fais quelques sorties natures avec Tekla & ses amis où leur campagne permettait de manger un peu de D+. Quelques sorties longues (dont l’une à l’Oxytrail avec mon amie Sophie), un petit peu de fractionné puis des run en EF pour travailler le coeur.
Ce n’était pas structuré, j’ai loupé pas mal de séances mais bon, le « mal » était fait et la date butoir approchait à grands pas.
Bizarrement, les seules fois où j’ai un peu près fais ce que je voulais, c’était en Tunisie où j’ai chaussé 6 fois mes baskets sur mes 2 semaines de vacances. Et avec 35°C au thermomètre, je suis assez fière de moi de ne pas avoir préféré rester dans la piscine 😉
Bref, c’est donc avec un entrainement un peu hasardeux que je suis partie le mardi 24 juillet. Nous sommes arrivés volontairement plusieurs jours avant la course pour s’habituer à l’altitude.
Le jeudi suivant, nous avons fais une randonnée passant sur une partie de la 1ère descente de la course. Le parcours est très friable et est jonché de cailloux/pierres. Pour le monter, ça ne me pose pas trop de soucis mais par contre la descente c’est l’horreur, je flippe un max. Ça s’annonce bien pour samedi !
Vendredi soir, veille de course, je suis très stressée. J’ai vraiment peur de ne pas y arriver. Il y a une barrière horaire vers le 21e km et je crains de ne pas être assez rapide pour la passer à temps. C’est bête de stresser pour une course, on ne joue pas sa vie. Mais cette boule au ventre ne veut pas trop partir.
Le samedi matin, réveil à 6h. On prend tous un bon petit dej et on s’apprête. Ils n’ont prévu que de la pluie vers 14h mais nous prenons tous une veste, la météo de la montagne change très vite. Je remercie d’ailleurs Véronique qui m’a sauvée la vie en me prêtant sa 2ème veste de pluie, j’avais bêtement oublié la mienne chez moi (touriste).
Départ
Didier et Véronique décident de descendre à pieds. Tekla, André et moi-même, on joue la carte de l’économie et on prend la télécabine. Guillaume nous retrouve en bas.
Petite pause pipi puis envoie d’un petit sms à Laura, j’aimerais bien la voir avant le début de la course. Je finis par la retrouver un peu avant le départ, elle me dit de ne pas stresser (ça se voit tant que ça ?!) et que tout se passera bien. J’aimerais bien être aussi confiante qu’elle mais j’ai l’impression de me jeter dans l’inconnu.
3…2…1…. Go !
Plagne Bellecôte – Roche de Mio
0-9km
755m de D+
Dès le début ça monte mais nous n’avons pas le droit de sortir nos bâtons à cause du nombre de participants trop élevé sur cette première partie de course. Et effectivement, nous sommes nombreux à serpenter le long du sentir qui grimpe en S.
Guillaume est déjà parti loin devant et je suis avec Tekla, André, Didier et Véronique.
L’ambiance est trop sympa, Didier n’arrête pas de faire des blagues à nous et aux autres coureurs et on rigole bien. Quand le sentier devient plat, je trottine mais ne cours pas, je veux garder mon jus pour après. J’essaie de bien balancer mes bras pour aider mes jambes à grimper. Arrivés en haut de Dou du Praz, nous pouvons mettre les bâtons et j’enclenche les miens.
Le terrain change et nous passons maintenant sur de l’herbe. Didier et Véronique sont juste là et Tekla et André ne sont pas très loin.
Je vois au loin une ribambelle de coureurs qui ont l’air d’être couchés sur la pente. Il y a une partie de la côte qui semble bien pentue. Mais pour l’instant je n’y pense pas et je me concentre sur ma montée. Les bâtons m’aident bien et je me cale sur un bon rythme.
J’ai emmené inutilement mes écouteurs (reflex de coureuse sur bitume) mais je n’ai pas éprouvé l’envie d’écouter de la musique une seule fois. La nature autour & les coureurs suffisent à me motiver pour avancer. Je ne vois pas le temps passer, d’ailleurs la méchante côte est déjà là. Gloups. Elle me semble vraiment raide mais pas le choix alors j’avance. Le rythme diminue forcément, certains s’arrêtent pour reprendre leur respiration ou reposer leurs cuisses. Je fixe le télésiège des Quilis. La fin de la côté est à son pied.
J’ai envie d’en finir au plus tôt alors je ne m’arrête pas.
Certains coureurs encouragent Minnie, je sourie et je les remercie. Je savais que mes oreilles allaient m’attirer des supporters 😉
Arrivée en haut, je retrouve Didier qui me demande si je vais bien. Je le rassure et je lui dis que je continue d’avancer pour pas perdre mon élan.
À ce moment là, je me retourne pour voir si mes amis sont pas loin et je croise Lisa. La veille je lui avais dis qu’elle me croiserait sûrement car les coureurs de la 6D et la 6D Lacs finissent par se retrouver sur une partie du parcours. Elle ne pensait pas qu’elle arriverait à me rattraper mais c’était sans compter son allure rapide et mon allure de tortue.
On se souhaite toutes les deux bon courage pour la suite et je la vois partir devant et dépasser pas mal de monde.
Je continue tranquillement ma course et essaie de relancer quand on passe sur du plat. Mais on finit par arriver par une belle petite montée en “S » où je dois m’arrêter net car il y a trop de monde. J’en profite pour prendre une photo car la vue sur le lac est à couper le souffle ! Certains coureurs n’hésitent pas à couper au travers pour grappiller quelques minutes. Je préfère la jouer réglo et suivre le chemin officiel.
Arrivée presque en haut de cette montée, je vois plus bas Didier & Véronique puis Tekla et André un peu plus loin. Des photographes nous attendent quelques mètres plus loin, je sourie et je continue sur ma lancée.
Le chemin repart en pente douce pour remonter ensuite et finir en S géant sur le flan de la montagne en face. Je reconnais la Roche de Mio et je sais que la première grosse montée prendra fin à ce moment là. Les bâtons m’aident à garder un rythme de marche pas trop mal. J’essaie de dépasser quelques coureurs mais d’autres me filent aussi devant.
Je gère assez bien mon souffle et je suis contente que ma bronchite ne m’ait pas trop gênée jusqu’à présent.
Je croise alors Séverine et ses deux filles qui descendent le chemin pour nous encourager. Guillaume est déjà passé il y a longtemps mais je leur dis que les autres ne sont pas loin derrière moi. Je suis ravie de voir des têtes connues, ça me donne un coup de pep’s pour avancer un peu plus rapidement.
Plus nous grimpons, plus j’entends les cris des supporters qui nous attendent à la fin de la montée. Ils sont vraiment nombreux ! J’ai l’impression d’être première tellement leurs acclamations et leurs encouragements sont extraordinaires.
Je finis enfin par arriver au bout de cette première étape. Je passe sous la tente pour qu’ils valident mon passage, je bois un coup d’eau et j’attaque la descente, ma plus grosse hantise.
Roche de Mio – Décrochoir
9 – 14km
900m D-
Mes jambes ne sont plus très fraîches mais j’essaie d’accélérer et de bien regarder devant moi. Je me fraye un chemin parmi les nombreux cailloux et pierres qui jonchent le sol. Je ne vais pas très vite, je me fais rapidement dépasser. Je suis très crispée, je flippe bêtement en descente. Mes chevilles, qui sont restées faibles après des entorses au lycée, me lancent un peu mais je m’aide un peu avec les bâtons et ça soulage pas mal les articulations. Mais le gros avantage d’être en descente c’est que je retrouve un souffle nickel.
Je vois au loin que j’arrive au point de ravito, les coureurs de la 6D vont à droite pour leur montée sur le Glacier pendant que nous, nous restons sur la descente. Je retrouve Laura, elle me dit que tout va bien et file continuer sa course. J’en profite pour m’arrêter, boire de l’eau fraîche, manger quelques tucs et enfiler ma veste de pluie car il commence à pleuvoir.
Je repars ensuite et continue de descendre, doucement mais sûrement. On finit par arriver sur le sentier que nous avions pris lors de la randonnée. Pour l’avoir pris dans les deux sens, je le connais par coeur (même s’il m’avait effrayée le jeudi) et en fait, je deviens plus confiante sur cette partie. Il pleut toujours mais ça fait du bien, ça rafraîchit. Cette dernière descente est passée vite et arrivée en bas, je reprends un rythme de course plus soutenu. Mon frère m’a dit que ça serait plat jusqu’à Plan Bois, alors let’s go !
Décrochoir – Plan Bois
14 – 22km
Bizarrement, je me suis vite ennuyée sur cette partie, je préférais mes montées ou mes descentes. Cette partie plate dure sur 4-5km sur un petit chemin à travers bois. Nous ne sommes pas nombreux d’ailleurs. Il y a un gars derrière mois et deux filles devant. J’ai vraiment l’impression d’être seule au monde. Ça change des courses sur route, c’est sûr ! Arrivée à la fin du 18e, ça descend un peu et… je me tord la cheville bêtement. Je m’arrête, j’ai mal et ça me lance bien. Les larmes me montent aux yeux et des coureurs me demandent si je vais bien. Je les rassure, je me suis juste tordue la cheville, la douleur ne va pas durer.
Heureusement que le chemin repart sur une longue pente, je suis obligée de repasser en mode marche active et ça permet de mieux stabiliser ma cheville.
Nous ne sommes pas encore à Plan Bois mais ça continue de monter. Et de plus en plus sec d’ailleurs. On finit même pas être sur une piste rouge. J’ai bien envie d’appeler mon frère pour lui demander quelle est sa version de plat selon lui ?
Heureusement, je vois le ravito au loin. Un regard à ma montre : je passe la barrière horaire avec 1h30 d’avance. Ouf ! Je suis ravie, j’avais vraiment peur de ne pas la passer. Je prends un peu de coca (sans sucre, really ?) & je me dis que plus de la moitié est passée. Il me reste 6km à faire.
Plan Bois – Arpette
22 – 25km
485m D+
Je repars du ravito en réalisant que oui, je vais terminer cette course. Je parle un peu avec une fille, elle n’a pas prit ses bâtons et le regrette car elle fatigue beaucoup plus. Surtout que la montée qu’il nous reste à faire ne s’annonce pas reposante du tout.
On remonte une montagne le long d’un sentier qui zigzag. La pente n’est pas hyper accentuée mais elle dure sur presque 3km et j’ai du mal à en voir le bout. C’est un petit sentier sur le flan de la montagne, on ne peut donc pas facilement doubler et j’ai peur de freiner les gens derrière moi. Je n’arrête pas de me retourner pour demander si des personnes veulent me doubler, mais à mon grand étonnement, ils me disent non et préfèrent rester scotcher à mon petit rythme. On essaie de se motiver car personne n’arrive à voir où est la fin, on est encerclés d’arbres.
La pluie, qui avait cessé depuis plusieurs km, décide de revenir au galop accompagnée de nombreux coups de tonnerre. En moins de 2min, on est trempés (j’avais rangé ma veste). Je n’ose pas m’arrêter, de peur de gêner et j’attends un espace un peu plus large pour l’enfiler.La pluie est très froide mais ça ne me gêne pas. Les arbres commencent à se faire plus rare et on voit enfin le sommet de cette longue côte.
J’aperçois plus loin l’arrivée du télésiège Bijolin (je crois) et je sais que l’arrivée de la côte se fait au télésiège les Arpettes. La fin de cette côte n’est pas encore pour tout de suite. Et en effet, après avoir dépassé le Bijolin, je vois les coureurs remonter une piste.
J’ai alors un vague souvenir de la descendre sur des skis – c’était beaucoup plus simple quand le paysage était recouvert de neige.
Ma fatigue me ramène vite à la réalité, je n’ai plus de jambes et je commence à payer mon manque d’entraînement.. Cette dernière côte se fera donc très doucement, j’ai hâte d’en finir.
Nos copains les photographes, qui choisissent vraiment de nous prendre au meilleur de notre forme, immortalisent ces dernière secondes de montée. Il me reste un peu de force pour sourire mais faudra pas m’en demander plus.
Arpette – Plagne Bellecôte
25km – arrivée
390m D-
Une fois en haut, je comprends qu’il ne me reste que 2/3km à faire. Que de la descente, ça devrait aller vite. Ou pas. L’orage est terminé mais il a laissé un sol boueux derrière lui et je force sur mes articulations pour ne pas glisser. Heuresement que les bâtons m’aident à me stabiliser un minimum.
Je réalise que l’arrivée se rapproche. Les chalets se font de plus en plus nombreux, on passe même vers l’appartement où je suis logée.
Je commence enfin à reconnaître l’endroit où je suis en train de courir. J’essaie d’accélérer, des supporters me tendent leurs mains et m’encouragent. J’ai même le droit à une haie d’honneur par des enfants, ravis de pouvoir encourager Minnie (ou même Mickey quand certains ne voient pas le gros noeud rouge au milieu des oreilles) Ça sent bon la fin !
Je guette Séverine, ses filles et Guillaume (qui doit avoir terminé). Ils sont là juste avant l’arche d’arrivé et me crient : “t’arrête pas, continue !” alors je redonne un coup d’accélérateur, je lève les bras et passe sous l’arche toute souriante.
Je suis FINISHER ! J’avais vraiment appréhendé cette course mais au final elle s’est hyper bien passée même si ce n’était pas facile. J’ai adoré. 5h14 d’effort, 30min de plus que sur mon dernier marathon et pourtant j’ai l’impression que c’était 10 fois plus facile. Le paysage, l’ambiance, le changement de terrain et dénivelé… c’était génial et je re signe pour un prochain quand l’occasion se présentera 🙂